Introduction
Fête du Lac 2018 — Chevelures (EXIFS : 100 ISO – 24 mm – f/9 – 8,2 s)
Depuis quelques années, j’ai la chance de pouvoir photographier depuis la tribune presse le feu d’artifice de la Fête du Lac. Du coup, j’ai souhaité partager, en plus des photos, la méthode que j’utilise dans ces cas-là. Ces photos peuvent paraître impressionnantes et très difficiles à faire, mais je trouve qu’au final avec n’importe quel appareil même premier prix il est possible de faire de superbes photos et j’espère qu’après que vous aurez lu mon billet vous en soyez convaincu. ;-)
Je tiens à préciser tout de même que ce que je vais détailler ci-dessous est ma méthode, je ne dis pas que c’est celle à adopter ni que c’est la meilleure, juste que c’est la mienne. :-)
J’ai en effet vu d’autres photographes ce même soir utiliser des méthodes bien différentes et toutes aussi intéressantes. La meilleure méthode est celle avec laquelle nous sommes le plus à l’aise.
Le matériel
Fête du Lac 2018 — Jouez sur les reflets, c’est une valeur sûre pour les feux d’artifices (EXIFS : 100 ISO – 62 mm – f/9 – 3,8 s)
Aussi bizarre que cela puisse paraître, il n’est pas nécessaire d’avoir du matos de dingue pour réaliser de belles photos de feu d’artifice, bien au contraire.
Dans le matériel obligatoire il vous faudra :
- un trépied : ça c’est l’objet à avoir avec vous obligatoirement, sans lui vous ne ferez rien de correct. Si possible, celui devra être le plus stable possible, privilégiez donc un trépied un peu lourd en aluminium qui fera amplement l’affaire
- Un appareil photo (bah oui, c’est mieux :-)) : pour le modèle peu importe tant que vous avez le mode manuel, ou M, dessus (pouvoir gérer soi-même l’ouverture et la vitesse pendant la prise de vue, car vous en aurez besoin) et avoir la possibilité d’utiliser la pose B (la pose B permet de laisser ouvert le miroir autant de temps que l’on souhaite pour prendre une photo). Un reflex, même entrée de gamme, fera très bien l’affaire et vous permettra de prendre des photos en RAW afin de les traiter derrière
- un objectif : idéalement dans des focales assez courtes. Pour le coup, l’ouverture de l’objectif n’est pas le plus important (on travaille généralement autour de f/8) donc le 18–55 mm à 150 € permet déjà de faire le job. Si vous avez peur que votre objectif n’ait pas assez d’angle, sachez que les premières années à la Fête du Lac j’étais avec un 24–70 (donc 36–105 mm avec le facteur multiplicatif de mon boîtier) et que le feu s’étalait sur plus de 700 m de long. Du coup vous imaginez bien que j’étais très loin de couvrir l’ensemble du feu (il fallait environ un 14 mm pour avoir tout le champ). Ceci dit, cela ne m’a pas empêché de faire des photos sympas
- une carte SD : si possible assez rapide et de grand volume, vous risquez de prendre plusieurs centaines de photos, ça serait bête d’être à court d’espace de stockage en plein spectacle
- et… bah c’est tout (dois-je préciser qu’il vous faut un spectacle pyrotechnique ? :-D)
Dans le matériel secondaire, vous pouvez avoir :
- une télécommande : filaire ou sans fil (radio ou infra-rouge) mais personnellement, même si j’en ai une, je trouve ça assez encombrant et du coup je ne l’utilise pas
Ma méthodologie
Fête du Lac 2017 — Pas assez de grand angle ? Pourquoi prendre le sol dans ce cas sur certaines photos ? (EXIFS : 200 ISO – 36 mm – f/8 – 3 s)
Passons maintenant à l’aspect pratique de la prise de vue de feux d’artifice. Ma préparation se déroule généralement en 3 étapes.
1. Bien avant le spectacle
L’idéal quand vous ne connaissez pas le coin où se passera le spectacle est d’aller faire des repérages la journée. Cela vous permettra de savoir où le feu sera tiré, où sont les photographes « officiels » (généralement ils sont à la meilleure place). Emportez votre matériel pour tester quelques cadrages de jour pour avoir une idée du rendu. Si vous avez la possibilité, essayer de trouver un coin un peu isolé qui permettrait d’avoir une vue originale : en altitude, de l’autre côté d’un lac pour profiter des reflets, en haut d’un immeuble, etc. Soyez innovant, c’est ça qui fera que votre photo se distinguera des autres. ;-)
Accessoirement, regardez la météo pour prévoir au cas où des sacs pour protéger votre matériel.
2. Juste avant le spectacle
S’il y a beaucoup de monde attendu au spectacle, arrivez bien avant le début pour vous assurer la meilleure place. À Toulouse j’arrivais généralement vers 15–16 h à mon emplacement pour prendre le feu à 22 h. Certes, la soirée est longue assit par terre, mais il faut ce qu’il faut pour n’avoir personne devant soi. ^^ installez de façon très stable votre trépied pour être sûr que celui-ci ne bouge pas. Vérifiez que personne ne puisse se prendre les pieds dedans. Assurez-vous aussi qu’il soit parfaitement horizontal (trépied et la rotule), cela vous permet d’éviter de trop dériver en horizontalité sur vos photos quand vous tournez l’appareil. Et surtout, ne sortez jamais la colonne centrale, c’est une source de flou énorme.
Pour l’appareil, voilà quelques paramètres à régler avant le spectacle :
- sensibilité : mettez la valeur la plus faible possible (100 ou 200 ISO). Vous prendrez souvent des poses longues, pas besoin de rajouter du bruit thermique et électronique pour rien
- mode : manuel (M)
- vitesse : pose B (BULB)
- ouverture : vers f/8 environ
- flash : pourquoi vous avez un flash ? Rangez-moi ça tout de suite ! :-D
- format des photos : RAW si possible (je ne sauvegarde même pas de JPG perso, ça prend de la place pour rien)
- mise au point : on en reparle après :-)
- balance des blancs : auto, on s’en fout vous shootez en RAW, vous verrez plus tard sur l’ordinateur. Et si vous shooter en JPG, de toute façon vous n’aurez pas le temps de régler la balance, donc auto aussi.
- désactivez la lumière d’autofocus ainsi que le bip au déclenchement, ça peut gêner vos voisins (ça doit être quelque part dans les paramètres de votre boîtier) :-)
Ah, un point très important pour être le plus performant pendant un spectacle pyrotechnique : il faut très bien connaître son matériel et pouvoir modifier très rapidement les paramètres à l’aveugle. Vous n’aurez pas le temps de chercher une fonction pendant 2 minutes.
3. Pendant le spectacle
Fête du Lac 2016 — Ne prenez pas que les plus grosses explosions, ce qu’il se passe au sol peut aussi être très joli à prendre en photo (fontaines, Bengales, etc.) (EXFS : 200 ISO – 105 mm – f/10 – 2 s)
Sachez d’abord que cette partie reste très chaotique et est sujet à un taux d’échec assez important. Ne désespérez pas, vous aurez au moins quelques photos bien à montrer. ;-)
Avec un peu de recul sur ce type de photos : faites ce que vous pouvez et vous verrez bien une fois chez vous.
Globalement, quand on photographie un feu d’artifice il n’y a que trois critères à prendre en compte : le temps de pose, la luminosité et la mise au point. Dit comme ça, la méthode peut être simple, mais vous verrez que vous n’arrêterez pas de régler votre appareil toutes les 30 secondes pour contrôler la lumière. Vous n’aurez aucun répit pendant toute la durée du spectacle ; d’ailleurs, n’espérez pas profiter du spectacle, vous n’aurez pas le temps. ^^
Du coup, la photo de feu d’artifice se résume à jouer sur le compromis entre le temps de pose et l’ouverture pour contrôler le flux de lumière (sans oublier le cadrage).
Parlons déjà des deux premiers : temps de pose et luminosité
Personnellement, je passe les premières explosions à me roder pour juger du temps de pose et des ouvertures qui donnent des bonnes luminosités (autour de f/6–f/9 généralement).
Ensuite, je me focalise surtout sur le temps de pose (en pose B) pour avoir une explosion complète. Pour ça, il faut tenter d’anticiper ce qu’on va voir pour commencer la photo juste au lancement de la fusée et s’arrêter juste après l’extinction de l’explosion. Souvent ça sera trop tôt, parfois trop tard, mais parfois vous aurez le bon timing. Avec un peu d’exercice vous y arriverez de mieux en mieux.
Je vérifie l’exposition de mes photos régulièrement pour m’assurer qu’elles ne sont pas trop cramées (l’inverse est rarement le cas). Dans ce cas, fermez un peu votre diaphragme pour réduire le flux de lumière sur le capteur pour les prochaines explosions (généralement il y en a plusieurs explosions identiques qui se suivent, tout n’est pas perdu ;-)).
Et la mise au point dans tout ça ?
Pour la mise au point il y a plusieurs écoles et ça dépend un peu de type de feu que vous photographiez.
Dans le cas de la Fête du Lac avec 700 m de largeur, la différence de distance entre deux zones éloignées créée un flou sur les explosions (même à f/8, ça se voit très vite sur des filés). Du coup je passe en mise au point auto pour me focaliser sur ma zone d’intérêt et ensuite je désactive la MaP pour rester sur la même distance. Quand je change de direction je repasse en auto pour la 1ʳᵉ photo. Si votre auto-focus est assez rapide ça se passe plutôt bien. Si votre autofocus rame (pas assez de lumière ou pas assez rapide), mettez-vous à l’infini et restez en manuel.
Dans le cas d’un petit feu qui n’est pas très large, vous pouvez faire la mise au point tout au début pour ne plus y toucher jusqu’à la fin. Ceci dit, vérifiez quelques fois vos photos pour savoir si vous êtes toujours bons, ça serait dommage de tout jeter, car vous n’étiez pas bien focalisés. ;-) Si vous êtes assez loin, vous pouvez vous placer à l’infini.
Côté cadrage
Deux cas de figure :
- soit vous avez une vision d’ensemble du feu avec votre objectif et du coup vous pouvez rester dans la même configuration pendant tout le spectacle
- soit vous n’avez pas assez d’angle et du coup il vous faudra jouer, en plus du temps de pose et de l’ouverture, sur le cadre et l’horizontalité de l’appareil (au pire ça peut se résoudre en post-traitement ça)
Les appareils récents proposent maintenant 18 voire 24 millions de pixels, n’hésitez donc pas à recadrer votre photo en post-traitement pour vous focaliser sur un sujet particulier. Tant que vous n’imprimez pas sur du 120 × 80 cm ça devrait bien aller. :-)
Avec le temps vous serez de plus en plus à l’aise sur ce type de photo.
En conclusion
Fête du Lac 2018 — Méfiez-vous pour le bouquet final, il est très lumineux. Fermez plus que d’habitude votre diaphragme sinon vous cramerez toutes vos photos. (EXIFS : 100 ISO – 24 mm – f/14 – 2,5 s)
Comme vous avez pu le constater, du moins je l’espère, d’un point de vue purement matériel, la photo de feux d’artifice ne nécessite pas de matériel hors de prix. Il faut cependant avoir une bonne maîtrise de son matériel pour faire des photos bien exposées et avec le bon temps de pose. Pour faire simple : il faut savoir quand commencer sa photo et quand l’arrêter et généralement vous aurez une photo correcte. Le reste peut se jouer en post-traitement (tant que la photo n’est pas entièrement cramée bien sûr).
Par contre, comme je l’ai mentionné plus haut, il vous faut connaître sur le bout des doigts votre appareil pour pouvoir changer les réglages très rapidement et à l’aveugle afin de ne pas perdre de temps. Cet aspect est peut-être le plus difficile au final et nécessite pas mal de pratique.
Une fois les photos réalisées, vous n’avez fait que la moitié du boulot : il vous reste encore la sélection des photos ainsi que le traitement qui fera toute la différente (d’où le format RAW).
Un dernier conseil : quand vous aurez 200 photos de votre spectacle, n’en montrez que les meilleures aux gens plutôt que toute votre série. ;-)
Voilà, j’espère que cet article vous aura intéressé et appris des choses. N’hésitez pas à partager cet article et à ajouter un commentaire à ce billet si vous vous posez encore des questions sur ce thème, j’essayerai d’y répondre le mieux possible. :-)
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